Auteur de L'Extrême Gauche plurielle (éd. Autrement, 2006), Philippe Raynaud est professeur de Sciences politiques à l'université Paris-II Panthéon Assas à l'Ecole des hautes études en sciences sociales.
Le NPA tient à partir de dimanche sa première université d’été. Comment voyez-vous les débuts de de ce nouveau parti, fondé en février?
Depuis le départ, je pense que la transformation de la LCR en NPA n’aboutira pas. Cette tentative pour élargir la base traditionnelle de l’organisation trotskiste est peut-être sincère mais la difficulté tient à la composition de cet alliage: aux anciens de la LCR, assez structurés avec une culture politique très cohérente s’agrègent de jeunes militants aux sensibilités diverses – écologistes, libertaires, etc. – qui n’ont souvent pas d’expérience politique et ne font pas vraiment le poids.
L’organisation n’arrive finalement à proposer que son éternel programme révolutionnaire, un peu abstrait pour la plupart des gens. Elle n’a pas réussi à présenter quelque chose de nouveau et porteur d’espoir et n’a pas réellement su communiquer hors de son public naturel, notamment auprès des jeunes des quartiers populaires.
Comment expliquer le score relativement décevant du NPA aux européennes, arrivé derrière le Front de gauche (PCF-PG)?
Le NPA a choisi de ne pas mettre en avant Olivier Besancenot, qui reste pourtant l’un de ses meilleurs atouts électoraux. Une option probablement moins porteuse. D’autant que le Front de gauche a bénéficié d’un tribun plutôt talentueux [Jean-Luc Mélenchon, ndlr] qui a, lui, été très présent et a relativement bien conduit son opération. Et Lutte ouvrière était en moins mauvaise santé qu'on ne le pensait: or le stock de voix n’est pas infini.
La CGT a refusé de se rendre à l’université d’été du NPA et lui a reproché de «donner des leçons aux responsables syndicaux, voire se substituer aux syndicats». Pourquoi ces relations houleuses ?
La LCR a traditionnellement tenté de construire des tendances sympathisantes dans les centrales syndicales: rappelons qu’au milieu des années 90, certains militants LCR ont favorisé l’apparition de SUD, même si la direction du parti aurait préféré rester dans les organisations existantes. Les tentatives d’implantation ont toujours provoqué des réactions d’agacement. La méfiance n’est pas nouvelle et il semble normal que les mouvements syndicaux n’aient pas envie de se laisser manger la laine sur le dos. D’autant que le NPA ne leur veut pas spécialement du bien en prônant la transformation du mouvement ouvrier de sorte que les les organisations dominantes soient supplantées par autre chose.
A l’issue d’une rencontre avec Jean-Luc Mélenchon, Besancenot s’est dit prêt à discuter d’alliances de premier tour aux élections régionales, sur «des bases clairement indépendantes du PS». Est-ce une inflexion de la part du parti qui avait préféré se présenter seul aux européennes ?
Probablement. Sur ce point, le NPA est sans doute un peu moins rigide que la LCR, sous la pression d’une partie des nouveaux militants qui souhaite aller dans ce sens. Qu’ils acceptent de s’allier n’est pas totalement impossible. Mais déjà, à la suite du référendum de mai 2005, on aurait pu croire à une alliance de toute la gauche antilibérale... que PCF et LCR avaient fait capoter. Or, les raisons de cet échec n’ont pas disparu.
Propos recueillis par Laure Equy.