Texte adopté par 64% des voix exprimées.
La campagne politique des élections européennes du printemps 2019 intervient dans un contexte social et politique où il est indispensable de faire entendre une voix lutte de classe et internationaliste du monde du travail.
Ces élections interviennent dans un contexte de tension politique en Europe, où les succès électoraux de l’extrême droite la hissent à des responsabilités gouvernementales dans différents pays et encouragent des agissements violents contre des migrants en Allemagne. Marine Le Pen pavoise et pousse le bouchon dans sa démagogie xénophobe et islamophobe.
Il en résulte un climat « anti-migrants » délétère, orchestré en France par la politique de chasse aux migrants que mène le gouvernement Macron, après ses prédécesseurs Hollande-Valls et Sarkozy. Et la France Insoumise de Mélenchon renchérit sur le contrôle des flux migratoires, invoquant désormais, à l’instar de Sahra Wagenknecht, une dirigeante de Die Linke en Allemagne, que l’afflux de migrants ferait pression sur les salaires et les allocations sociales des autochtones. Face au protectionnisme et nationalisme réactionnaires, Mélenchon et d’autres lancent la mode du « protectionnisme de gauche » ou « protectionnisme solidaire » !
Le contexte international est lui aussi des plus tendus, économiquement et politiquement. Les profits des multinationales les plus prédatrices, et les dividendes de leurs actionnaires, sont à la hausse, tandis que les États nationaux à leur service, à commencer par ceux des grands pays industriels, peaufinent partout de nouvelles lois et règlements pour restreindre la masse salariale et réduire tous les budgets publics sociaux. Dix ans après la crise de 2008, les banquiers et industriels ont été renfloués, mais l’éducation, la santé, les transports sont peu à peu dépecés et livrés aux appétits privés. La situation est également marquée par les guerres du Moyen-Orient, d’Afrique ou d’Asie, qui en dernière analyse sont la conséquence des conflits engendrés par les rivalités et appétits des multinationales et de leurs Etats, qui quadrillent militairement la planète et enrôlent des forces supplétives.
Mais ces Européennes constitueront également le premier test électoral de Macron, à la mi-mandat. Face à Macron et à son offensive contre les classes populaires et la jeunesse, il est nécessaire qu’une voix anticapitaliste et internationaliste s’y oppose, en toute indépendance de classe, après notamment un premier carton rouge délivré au printemps dernier par les cheminots et une partie de la jeunesse, mobilisés dans les grèves et dans la rue, et la crise politique de l’été.
Car ces élections européennes interviennent dans un contexte qui est aussi de résistances et de luttes, voire de mobilisations plus conséquentes comme au printemps dernier. Même si rien n’est évidemment terminé dans le bras de fer entre les classes. D’autres rendez-vous ont eu un succès inattendu, dont la journée sur le climat du samedi 8 septembre, boostée par la multiplication des désastres écologiques sur cette planète, plutôt que par les aventures de Nicolas Hulot en Macronie. Par ailleurs, c’est loin d’être l’unanimité derrière les sirènes xénophobes et racistes. Une partie de la population est solidaire des migrants, choquée par l’attitude adoptée par Macron dans l’affaire de l’Aquarius. Elle sait le montrer même si les occasions restent localisées.
Il en va de même de bien d’autres luttes existantes, contre les licenciements (comme à Ford mais pas que), contre les suppressions de postes (dans les hôpitaux, à La Poste, à SNCF ou dans l’éducation), contre la répression patronale ou étatique qui frappe des militant(e)s. Les mobilisations restent isolées et bien souvent prisonnières de cadres étriqués de contestation, voulus tels par des directions syndicales très intégrées au système économique et politique bourgeois et qui se limitent à mobiliser pour accompagner des rounds de dialogue social. Loin de la perspective d’un tous ensemble nécessaire.
Le mécontentement, voire la colère, en tout cas la politisation d’une partie de la jeunesse, marquent la situation. A l’échelle du NPA, cette politisation s’est mesurée par l’affluence à l’université d’été et l’audience des porte-parole du parti dans les médias. Sans oublier les jeunes qui rejoignent le NPA. La politisation se mesure à sa façon aussi par l’affluence à la fête de l’Humanité. Il y a du monde qui s’inquiète, qui se préoccupe, qui discute âprement, qui est en demande de perspectives politiques. Il nous faut répondre à la demande, sur le maximum de terrains possibles, dont le terrain électoral car il est avant tout politique, en nous engageant dans une campagne nationale pour les européennes.
Une campagne commune des révolutionnaires
Dans ce pays, au travers d’une histoire longue de quelques décennies déjà, le NPA (issu de l’ex-LCR) et LO ont gagné du crédit dans le monde du travail. Certes, sur l’Europe comme sur la manière de formuler la question des institutions, il existe des divergences qui ne seront pas réglées de sitôt. Il faut pourtant rappeler que ces divergences n’ont pas empêché la LCR et LO, dans le passé, de mener des campagnes communes. Chacune des organisations conservant évidemment sa liberté de parole.
Par-delà des divergences et des façons de faire propres, les deux organisations défendent aujourd’hui de grands axes qui justifieraient une candidature commune : contre cette Europe du Capital dont les responsables, dans tous les pays, extorquent toujours davantage aux classes populaires pour engraisser le grand patronat ; hérissent leurs frontières de barbelés alors que leurs multinationales exploitent la planète entière. C’est la politique bien connue du bouc émissaire. Il faut laisser croire aux travailleurs que les migrants seraient la menace. Mais qui licencie à Air-France et ailleurs, les patrons ou les migrants ? Qui baisse les pensions de retraite et s’apprête à diminuer l’indemnisation du chômage ? Qui réduit à la portion congrue les services publics et finit de détruire le logement social ? Les gouvernements de l’Union Européenne ou les migrants ? Le patronat voudrait exploiter les travailleurs et, par-dessus le marché, les diviser entre eux, entre autochtones et arrivés de fraîche date. Contre le racisme et la xénophobie cultivées par les classes dominantes pour mieux diviser le monde du travail, il s’agit d’opposer notre internationalisme de classe.
La situation politique exige qu’une campagne nationale fasse entendre haut et fort la voix de ceux qui luttent et qui résistent, une campagne qui mettent sur le devant de la scène la nécessité du tous ensemble, du regroupement des bagarres comme perspective pour mettre à genou le gouvernement et le patronat, en France, comme dans le reste de l’Europe.
Voilà la campagne que pourrait incarner un tandem NPA et Lutte Ouvrière, qui offrirait un pôle d’extrême gauche incarnant une véritable voix combative du monde ouvrier. Olivier Besancenot a fait entendre cette voix en conclusion de son intervention politique à la fête de l’Humanité, en affirmant que nous rejetons les frontières géographiques des bourgeoisies et de leurs nations, que nous ne connaissons que la frontière de classe.
LO comme le NPA ont ainsi bien des raisons de faire liste commune dans ce scrutin à l’échelle nationale : pour dénoncer les aspects de l’exploitation capitaliste, les attaques et l’arrogance de Macron, mais aussi et surtout, car c’est un tout indissociable, pour s’en prendre aux démagogues d’extrême droite, de droite ou de gauche voire prétendue gauche de la gauche souverainiste, et élever contre eux la seule voix réellement dissidente et audible, la voix prolétarienne et internationaliste. Personne d’autre ne la portera si ce n’est l’extrême gauche.
Cela ne veut pas dire qu’il n’y ait pas des désaccords avec LO, mais ils n’empêchent pas plus aujourd’hui que dans le passé une campagne commune, de classe, révolutionnaire et internationaliste autour d’un programme rejetant toute tentation au repli national et se situant dans la perspective d’une Europe socialiste des travailleurs.
Il en va de notre responsabilité, de mobiliser nos moyens politiques, humains et matériels (dont financiers), pour que s’engage une campagne politique commune de l’extrême gauche. S’y refuser serait un renoncement politique, particulièrement dans le contexte actuel. C’est aussi la responsabilité de Lutte ouvrière, mais à nous, du côté du NPA, de nous montrer convaincants.
Il s’agit donc que l’extrême gauche se donne les moyens politiques et matériels de présenter à ces élections une liste de militantes et militants qui, nationalement ou régionalement, sont connus pour leurs engagements dans des combats politiques et sociaux et se feront les porte-paroles de leur classe et de sa jeunesse.