Ils se hissent sur la pointe des pieds, les mains en visière, pour empêcher les rayons du soleil de Port-Leucate (Aude) de voiler la silhouette longiligne de Philippe Poutou. A 44 ans, l’ouvrier à l’usine Ford de Blanquefort (Gironde) ne déambule plus comme un simple militant sur le front de mer de la station balnéaire où se tient l’université estivale du Nouveau Parti anticapitaliste (NPA).
Depuis que ses camarades l’ont désigné il y a deux mois, il est le candidat à la présidentielle du parti.
« T’as vu! Il est là-bas », lance Nicole, une militante, à son compagnon, en désignant le successeur d’Olivier Besancenot prendre place, le sourire un brin crispé, devant une cohorte de caméras.
Entre espoir et inquiétude
Tee-shirt noir estampillé Che Guevara, chapeau sombre et cheveux longs, Patrick, 52 ans, le fixe avec satisfaction : « Je suis trop content qu’il nous représente. C’est un travailleur de base, comme nous. J’aime son côté décontracté, abordable. » Nicole l’interrompt : « Comme il débarque un peu, il est très nature. » Patrick, lui, fait la moue. « Il n’a pas le charisme de Besancenot, mais ça va venir », espère ce peintre en bâtiment venu de Toulon pour l’occasion. L’ombre du facteur de Neuilly plane encore quand Fiorella confesse sa « pointe de mélancolie » depuis qu’Olivier Besancenot a décidé de ne pas se présenter à nouveau.
Gérard, qui arbore lui aussi un marcel à l’effigie du leader révolutionnaire argentin, estime que le changement de candidat constitue « un atout qui colle à la volonté de dépersonnalisation du NPA ». L’ami qui l’accompagne opine du chef : « Je m’en fiche complètement de le voir. » A deux pas de là, Marc admet ressentir une « certaine inquiétude » quant à la capacité du novice à mener une telle campagne. « Il n’a pas la même vivacité que Besancenot, pas le même humour. Mais pour le symbole, un ouvrier, c’est idéal. » Un peu plus loin, un autre militant soupire : « On s’en fout de son style. Il connaît nos révoltes. Son job, c’est de les exprimer simplement. »
Ava Djamshidi.