Ces vendredi 18 et samedi 19 décembre, des manifestations ont lieu dans plus de 50 villes autour des mots d’ordre de l’Acte 4 du mouvement des sans-papiers : « Liberté, égalité, papiers ! ». Quelque chose a commencé à changer grâce à la mobilisation extraordinaire de ce mouvement depuis le 30 mai dernier et la marche nationale des sans-papiers de septembre et octobre.
Un mouvement qui s’étend
Ce sont désormais 24 collectifs de sans-papiers qui sont à l’initiative, dans la région parisienne mais aussi à Lille, Marseille, Grenoble, Lyon, Strasbourg, Montpellier... Un collectif de couturiers sans-papiers est né dans le quartier de la Goutte d’or à Paris : ces couturiers ont fabriqué les masques pour Anne Hidalgo, maire de Paris, alors qu’il en manquait partout ! À Rouen ce sont des femmes sans-papiers qui s’engagent dans la lutte. Et ce sont bien sûr les réseaux qui se sont mobilisés sur toutes les étapes de la marche nationale de cet automne qui sont les locomotives de cet Acte 4, entraînant dans leur sillage d’autres villes.
La mobilisation a aussi un impact sur le mouvement ouvrier, en particulier sur les forces syndicales. Des structures s’engagent : unions départementales ou locales de Solidaires, de la CGT ou de la FSU, syndicats de secteurs... La CGT confédérale appelle « l’ensemble des salariéEs » à se joindre aux manifestations. De plus, différentes associations dont la Ligue de l’enseignement, la LDH, Médecins du Monde, le Syndicat des avocats de France ou le Syndicat de la magistrature, appellent à rejoindre les initiatives en prenant position pour la liberté de circulation et d’installation et en exigeant une régularisation massive des sans-papiers.
Rompre l’invisibilisation
Grâce à la détermination et à la réalité de ce mouvement de solidarité, ce qui était caché est en passe de devenir un enjeu politique public, alors que tout été fait pour l’invisibiliser. Car poser la question des migrantEs, c’est poser des questions essentielles sur la société dans laquelle nous vivons : les rapports nord/sud, et la production indécente de richesses qui s’accompagne d’inégalités sociales de plus en plus criantes et d’atteintes de plus en plus profondes aux libertés, à commencer par celle de circuler...
Le statut même de sans-papiers impose, pour ceux qui le défendent, de justifier l’inégalité à tous les niveaux, d’où découlent le racisme et l’idée fausse qu’il n’y aurait pas assez de moyens financiers et matériels pour accueillir. Des arguments dont on voit clairement en ce moment comment, en se généralisant, ils se mettent à attaquer des secteurs de plus en plus importants de la population.
Pour l’égalité, contre le racisme d’État, c’est le moment !
Si la question commence à se discuter publiquement, dans les faits rien n’a changé. Beaucoup se sont indignés mais les migrantEs violemment évacués de la place de la République à Paris il y a trois semaines… sont toujours à la rue ! Sous l’impulsion du gouvernement français, les mesures européennes ne font que se durcir, multipliant les drames sur les routes de la migration. Les conditions de survie des sans-papiers et leur surexploitation ne font qu’empirer. Et les couturierEs qui ont fabriqué des masques pour Anne Hidalgo sont toujours à la merci d’un contrôle policier...
La force que prend le mouvement en faveur de la régularisation des sans-papiers et la liberté de circulation commence à bousculer les choses et embarrasse le pouvoir. C’est le moment ! Faire classe commune avec les sans-papiers, c’est construire des bases solides pour ne plus reculer sur rien.
Le mardi 15 décembre 2020