Les mineurEs isolés étrangers ou MNA (mineurEs non accompagnés) ne sont pas des sans-papiers. L’État ne peut pas exiger un titre de séjour d’un mineurE, et ne peut pas l’expulser. En revanche, d’après la loi, il a le devoir de les prendre en charge. Mais c’est loin d’être le cas.
Le nombre de jeunes isoléEs en danger augmente. En 2017, 25 000 jeunes étrangerEs ont été accueillis et hébergés par l’Aide sociale à enfance (ASE). Ils et elles représentent moins de 15 % des enfants pris en charge par l’ASE, ce qui n’est pas un nombre énorme et, de toute façon, là n’est pas la question : il y a obligation d’accueil pour des raisons simplement humanitaires et légales. Les départements invoquent de leur côté un manque de moyens pour les accueillir. La cause de ces dysfonctionnements sont les pouvoirs publics qui, en soupçonnant ces jeunes de frauder et en refusant de les prendre en charge, ont créé des situations dramatiques de jeunes abandonnéEs.
Qui sont ces jeunes ? Quelles sont les raisons de leur départ ?
Les causes n’en sont pas toujours connues. CertainEs fuient la guerre, la misère, la mort de leurs parents. Ils et elles ont traversé la mer, emprunté des routes violentes et dangereuses… Après avoir vécu un exil terrible, ces enfants se retrouvent en France à errer dans la rue et, dès leur arrivée, commence un parcours du combattant.
Pour commencer, le fichage. Avec la loi asile-immigration du gouvernement Macron, c’est désormais au commissariat ou à la préfecture, et non aux services de la protection de l’enfance, que les jeunes en quête de protection devront s’adresser en premier. Leurs empreintes y seront enregistrées, tout comme leur photo et des informations personnelles comme leur numéro de téléphone. Un refus de communiquer ces informations pourra être transmis au Conseil départemental et alimenter une suspicion de majorité.
Quand le ou la jeune se présente à l’ASE, systématiquement sa minorité est contestée suite à une évaluation. Trop fréquemment ce sont des entretiens menés à charge et à la va-vite par une ou deux personnes non formées qui s’appuient sur des impressions subjectives plutôt que sur l’acte de naissance. Les documents d’état civil sont presque systématiquement considérés comme faux. Les évaluations peuvent se fonder sur des tests osseux (reconnus légaux par le Conseil d’État), dont on sait pourtant la faible fiabilité scientifique. L’adolescentE peut contester la non-reconnaissance de minorité devant un juge pour enfant. Mais dès l’instant où il/elle n’est pas reconnu mineurE, c’est la rue, sans rien. S’il ou elle continue de se déclarer mineurE, le 115, qui est un hébergement d’urgence pour les adultes ou les familles, refusera la prise en charge. S’il ou elle se déclare majeurE, l’administration l’utilisera comme « preuve » supplémentaire.
Quand la minorité est reconnue, il ou elle est pris en charge par l’ASE, mais dans des conditions plus difficiles réservées aux étrangerEs : dans des hôtels, le plus souvent mal accompagnés par les services sociaux, pour faire leurs démarches, trouver un apprentissage, être scolarisés, se débrouiller sans un sou, avoir un suivi médical…
Puis quand ils et elles deviennent majeurEs, l’ASE arrête immédiatement leur prise en charge, et c’est à nouveau la rue. Ils et elles ont un an pour obtenir un titre de séjour… Passé ce délai, sans régularisation, ils et elles se retrouvent « sans papiers ».