CHATELLERAULT (AFP)- Les "Fabris", qui ont menacé début juillet de faire sauter leur usine, ont manifesté jeudi à Châtellerault avec d'autres salariés touchés par des restructurations industrielles, à la veille d'une assemblée générale décisive sur la suite de leur mouvement.
Au moins 3.500 personnes selon les syndicats, 1.800 selon la police, ont défilé dans les rues aux côtés des salariés de l'équipementier automobile qui réclament une prime de départ de 30.000 euros.
Partis du site de l'usine New Fabris (fabrication de pièces mécaniques) à la périphérie de Châtellerault, les manifestants qui ont également reçu le renfort de quelques personnalités de gauche ont convergé vers le centre-ville.
"Renault, PSA Peugeot sont en train d'organiser la désertification industrielle de la France - New Fabris 366 licenciements", pouvait-on lire sur une banderole.
Un porte-parole des salariés, Guy Eyermann (CGT), a annoncé la création d'un "collectif pour toutes les entreprises qui luttent contre les patrons voyous et leurs actionnaires", devant le défilé dans lequel figuraient notamment des salariés de Thales, de Continental, Molex, Aubade, Renault ou encore Ford.
"Nous ne pourrons gagner qu'en réunissant toutes les entreprises et toutes les organisations syndicales", a estimé M. Eyermann, avant de conclure: "On se sera battu jusqu'au bout et c'est notre fierté".
Les salariés de New Fabris doivent tenir une assemblée générale décisive vendredi, date limite qu'ils avaient fixée pour obtenir satisfaction sur le montant de la prime.
Les bouteilles de gaz qu'ils avaient installées sur le toit de l'usine au début de leur action ont été remisées dans un local la semaine dernière, mais les salariés ont entretenu depuis un certain flou sur leurs intentions.
"On a renoncé à toute violence, maintenant si la majorité (des salariés) refuse la somme proposée, il y aura des dégâts", a prévenu M. Eyermann.
"Je ne peux pas dire aujourd'hui si je voterai pour les 11.000 euros (somme proposée par le gouvernement, NDLR)" lors de l'AG, a déclaré à l'AFP Laurence, depuis 7 ans chez New Fabris. "11.000 euros + 2.700 euros (part variable attribuée en fonction de l'ancienneté), pour moi, c'est nettement insuffisant", a-t-elle estimé.
Jeudi après-midi, le ministre de l'Industrie Christian Estrosi a proposé d'être "dès ce soir au rendez-vous du dialogue dans la perspective d'une sortie de crise heureuse à l'issue de la rencontre programmée demain" vendredi.
A une condition toutefois: que les salariés expriment "très explicitement leur rejet de toute forme de violence". "La condamnation de toute forme d'ultimatum est un préalable à toute discussion", a ajouté le ministre.
Ségolène Royal, présidente PS du conseil régional Poitou-Charentes, lui a cependant demandé de "faire un geste supplémentaire" pour parvenir à "une issue satisfaisante et digne pour les salariés".
"Si les salariés en arrivent à mettre des conditions aussi radicales, c'est à cause de la surdité des décideurs. Le gouvernement a mis des sous sur la table pour les entreprises en difficulté, si elles ferment ce sont les salariés qui doivent en bénéficier", a estimé de son côté Guy Savin, un des porte-parole des salariés de Molex, venu soutenir les "Fabris".
"Ce qui est important aujourd'hui, c'est qu'il y ait un maximum de diversité d'entreprises au sein de la manifestation (...) A la rentrée, le gouvernement a du souci à se faire", a promis Sylvie Sanguiol, déléguée Sud au sein du technocentre de Renault Guyancourt.