Silhouette gracile, regard bleu vert qui bat des ailes. Mais ne vous fiez pas aux apparences : Mathilde Eisenberg, 28 ans, est une tueuse. Une guerrière déterminée, lancée dans une chasse au long cours : celle de 500 signatures de maires, sésame indispensable pour que le candidat du Nouveau Parti anticapitaliste (NPA), Philippe Poutou, puisse se présenter à l’élection présidentielle.
Sur les 310 paraphes péniblement glanés par le NPA, la jeune femme, institutrice à Gennevilliers (Hauts-de-Seine), a ramené un précieux butin : neuf signatures d’élus. « Elle est dans le top5 des camarades qui en ramènent le plus », explique Thibault Blondin, le responsable de la commission signatures du NPA. L’une de celles qui y consacre l’essentiel de son temps libre aussi : quasiment tous ses week-ends et une bonne partie de ses vacances depuis le mois de juillet, « parce que ce serait une véritable catastrophe de ne pas avoir de candidat », dit-elle. Alors tant pis si sa mère et son père, ancien militant communiste, « ne comprennent pas trop la démarche ». Au fil du temps, le mode opératoire s’est affiné : éplucher les listes des petites communes du Pas-de-Calais (son terrain de chasse), repérer les noms des maires et leurs adresses personnelles, les soirs de semaine. Le week-end venu, le réveil de Mathilde sonne tôt. En voiture, la jeune militante, membre du comité exécutif du NPA, file vers le Nord. Et frappe à la porte des élus de villages, « quelle que soit leur couleur politique ». « On n’appelle pas. C’est plus facile de nous jeter par téléphone. Une fois qu’on est sur le pas de leur porte, ils sont plus enclins à écouter », raconte-t-elle. Même s’ils évoquent régulièrement les mêmes arguments pour justifier leur refus : dispersion des voix à gauche, pression des habitants ou chantage aux subventions. Pas de quoi perturber celle qui a affûté sa force de conviction sur le parvis de la fac de Nanterre (Hauts-de-Seine), comme militante de l’Unef. « A la rentrée, pour les syndiquer, on chope des étudiants de tous bords. C’est un peu le même mécanisme », analyse Mathilde Eisenberg, qui a eu l’occasion de s’y exercer pendant ses études de philosophie, de 2002 à 2009. Quelques expériences d’animatrice dans les supermarchés (pour des chewing-gums ou des yaourts) ont fini de parachever sa formation de chasseuse de signatures. « C’est un exercice difficile. Ce n’est pas du militantisme habituel. On ne s’exprime pas devant un public acquis à notre cause », souligne-t-elle. Mais la véritable force de la Diane du NPA réside dans sa pugnacité. « Tant qu’on ne m’a pas dit non, je reviens à la charge! rougit-elle. Parfois, au bout de la troisième ou quatrième visite, ils finissent par craquer. » Insister sans écœurer. Un talent qui force l’admiration du chef des signatures du parti : « Elle maîtrise ce dosage qui demande beaucoup de subtilité. » Alors, comme d’autres « partent au sanglier ou à la bécasse », elle part « aux signatures », dès que son emploi du temps le lui permet, dans l’espoir de décrocher le maximum de paraphes pour le 16 mars, date butoir de la remise des parrainages. Et celle de son 29e anniversaire.
Ava Djamshidi Née le 16 mars 1983. 2002 : Jean-Marie Le Pen accède au second tour de l’élection présidentielle. Dans la foulée, Mathilde Eisenberg adhère à la Ligue communiste révolutionnaire (LCR), qui deviendra le NPA en 2009. 2002 : adhésion à l’Unef. 2009 : élue au comité exécutif du NPA. 2010 : premiers pas comme professeure des écoles.