INTERVIEW LE SCAN POLITIQUE - Le dirigeant du NPA réagit au départ de Philippe Poutou de la direction du parti. Combatif, il veut célébrer la mi-mandat de François Hollande «dans la rue».
LE SCAN. - Comprenez-vous la démission de Philippe Poutou de la direction du NPA?
Olivier BESANCENOT. - Je comprends surtout que Philippe ne démissionne ni du NPA, ni de la direction dont il reste membre, ni des tâches de représentation publique qu'il continue à assumer, cette semaine encore, auprès de salariés en lutte. Il quitte l'instance exécutive pour des raisons de fonctionnement dont il a redit aux journalistes qu'il souhaitait qu'elles soient discutées en interne et pas dans les tribunes des journaux. Ce que je respecte. En un mot, que nos détracteurs comprennent bien une chose: dans les semaines qui viennent, il faudra compter avec Poutou, le NPA et tous ceux qui veulent changer ce monde avant qu'il nous écrase!
Dans le dernier baromètre TNS-Sofres pour Le Figaro Magazine, vous enregistrez une progression de 4 points (24% de cote de confiance) en prenant 6 points chez les sympathisants de gauche et 11 points sans chez les sympathisants du PS, sans que l'on vous ait spécialement vu ou entendu. Comment analysez-vous cela?
J'ai appris à garder de la distance par rapport aux sondages, qu'ils soient bons ou mauvais. Ceci étant, depuis plusieurs mois, nous avons des retours militants du terrain qui nous disent que l'on prête à nouveau l'oreille à notre discours, et que l'on a tendance à refaire appel à nous pour agir, que ce soit sur les questions de licenciements, de services publics, sur l'écologie, la Palestine, etc. On a pu le constater à travers nos réunions publiques, notre université d'été fin août, ou par l'affluence à notre stand à la Fête de l'Huma, etc. Un petit milieu militant se tourne vers nous, et cela faisait quelque temps que cela n'était pas arrivé. Beaucoup se sentent orphelins d'une parole de gauche clairement identifiée comme opposée à la politique du gouvernement et qui ne tergiverse pas pour l'assumer. Alors, à ceux qui pronostiquaient en 2012 la mort du NPA, j'aime leur répondre, comme le chantait NTM: «On est encore là!»…
Comment comptez-vous vous faire entendre?
Un peu à l'image de ce que nous avions fait , de manière unitaire, le 12 avril dernier, après la nomination de Manuel Valls au gouvernement, nous pensons que les forces de la gauche non gouvernementale, sociales, associatives et politiques ont, une nouvelle fois, la responsabilité d'organiser une grande manifestation. Pourquoi pas autour de la mi-novembre? Le seul cadeau à faire à François Hollande pour la mi-mandat, c'est une bonne vieille révolte qui cherche à faire tomber le budget et le pacte de responsabilité. Il faut que la rue et le pavé soient occupés par un grand mouvement d'opposition unitaire à la politique d'austérité que mène l'exécutif. L'unique contre-pouvoir crédible à ce gouvernement, c'est le pouvoir de la rue.
Début octobre, Arnaud Montebourg, Benoît Hamon ou Emmanuel Maurel ont pris la parole. Pourriez-vous vous retrouver dans leur combat contre la politique du gouvernement?
Tous ceux qui veulent résister sont les bienvenus. Mais pour l'instant, je n'ai pas entendu les frondeurs ou ceux qui étaient dans le gouvernement passer des paroles aux actes. Ils ont parlé très fort aux mois de juillet et de septembre, pour finalement s'aplatir au moment de voter le budget… Et il me semble qu'Arnaud Montebourg s'intéresse plutôt aux échéances présidentielles de 2017 et à son destin personnel qu'à la lutte politique contre le gouvernement.
Vous parliez du terrain, êtes-vous inquiet de ce qui vous remonte?
Il y a une colère sourde et un grand sentiment d'injustice qui traversent la société. Je ne lis pas dans le marc de café mais je sais que l'on ne peut pas éternellement taper à bras raccourcis sur les classes populaires sans qu'il y ait des conséquences à un moment ou un autre. On a eu la crise économique, la crise sociale, la crise écologique, maintenant on a la crise politique. Lorsque la goutte d'eau fera déborder le vase, il débordera à plein. Ça finira immanquablement par craquer. Personne ne peut pronostiquer quand ou comment, mais ça pétera. Ce que je souhaite du fond du cœur, c'est que ça craque avant 2017…