Publié le Samedi 25 juin 2011 à 10h07.

Au NPA, la gueule de bois de l'après-Besancenot (Libération.fr)

Back to LCR. Le Nouveau parti anticapitaliste entre ce week-end dans l’ère post-Besancenot. Et elle ressemble drôlement à celle de la Ligue communiste révolutionnaire (LCR), ancêtre du NPA…

A Nanterre (Hauts-de-Seine), les délégués de la formation d’extrême gauche doivent désigner samedi soir ou dimanche matin leur candidat à la présidentielle dans un contexte «compliqué», euphémise-t-on du côté de la direction. Le parti est coupée en deux sur son orientation, la direction est divisée, il faut trouver dans l’urgence un candidat de substitution à Olivier Besancenot, forfait depuis juin, et stopper l’hémorragie militante.

De 9000 militants revendiqués en février 2009 lors de la transformation de la LCR en NPA, les anticapitalistes sont passés à 6000 adhérents – dont 4500 à jour de cotisation – lors du dernier congrès de février pour finir, aujourd’hui, à 3000 votants dans les assemblées préparatoires à cette conférence nationale… Le NPA est retombé au même étiage que du temps de la LCR. «ça devrait inquiéter tout le monde et provoquer un sursaut dans le NPA», fait remarquer Pierre-François Grand, membre de la direction et ancien proche de Besancenot.

La priorité du NPA: trouver un remplaçant à Olivier Besancenot pour la présidentielle. Le facteur a laissé en plan ses camarades début mai, refusant, à 37 ans, de rempiler pour une troisième course à l’Elysée après 2002 et 2007. Dans l’urgence, la nouvelle majorité a sorti son favori: Philippe Poutou, 44 ans, réparateur de machines-outils à l’usine Ford de Blanquefort (Gironde).

Problème: le parti est tellement divisé que le choix de ce père de deux enfants et syndicaliste CGT n’est pas encore acquis. «Il n’est pas impossible que la proposition d’une des deux porte-parole [Myriam Martin ou Christine Poupin, lire ici leur portrait] ressorte», assure un cadre du NPA pour qui Poutou est «quelqu’un qui n’a pas la carrure pour être candidat à la présidentielle». «Ceux qui pensent qu’on a sorti Olivier Besancenot comme ça se trompent! Il était dans la direction depuis 3-4 ans!» poursuit un responsable. Un come-back de Besancenot? «C’est vraiment une question qui est enterrée dans le NPA», dit-on à la direction.

«Il est tout a fait possible de se rassembler autour d’un candidat», défend Christine Poupin, l’une des deux nouvelles porte-parole du NPA. «Dans une situation où ce qui domine est la crise du capitalisme, poursuit Gaël Quirante, un des responsables de la frange la plus révolutionnaire du NPA, c’est très bien qu’une organisation comme la nôtre présente un ouvrier qui a mené des bagarres, un porte-voix d’une catégorie sociale qui souffre avec la crise». Et qui ne laisse pas au FN le monopole de la défense des ouvriers…

Sauf que ce profil «ouvriériste» déplaît à une partie de la direction. «On est parti pour faire de la concurrence à Lutte ouvrière…», critique-t-on. Dans les votes préparatoires à la conférence nationale, le texte menée par les plus révolutionnaires associés à des responsables de l’ancienne majorité comme Olivier Besancenot, Sandra Demarq ou Christine Poupin a obtenu une courte majorité, 50,2% contre 40,2% pour la minorité, menée par Pierre-François Grond et l’autre porte-parole Myriam Martin. Critiquant «l’isolement» et le «repli» de la nouvelle majorité, ces derniers défendent la poursuite des discussions avec le Front de gauche. «La méthode est de dire: on maintient le dialogue avec les autres partis», explique Frédéric Borras qui estime qu’en «situation de crise», «il faut être plus souple que trop raide».

Paralysé par l’émergence du Front de gauche depuis les européennes de 2009, touché par la mort du philosophe Daniel Bensaïd, déstabilisé par la candidature d’une jeune fille portant un foulard lors des régionales de 2010 dans le Vaucluse et surtout ébranlé par le refus de Besancenot, dernier pilier qui maintenait un équilibre précaire, le NPA est sorti de sa période de blocage mais risque, si ce n’est l’implosion, concéder l’échec de son projet initial: devenir la grande force à la gauche du PS. «Je ne sais pas ce que va donner le NPA dans les mois qui viennent», prévient un cadre.

Lilian Alemagna