Port-Leucate (Aude), envoyée spéciale. Pas facile de succéder à Olivier Besancenot. Philippe Poutou, le candidat du Nouveau Parti anticapitaliste (NPA) à la présidentielle, le reconnaît volontiers. « Je n’ai pas le même style que Besancenot. Je vais essayer de montrer que je sais au moins lire », lance-t-il, le rire nerveux, à quelque 850 militants réunis depuis dimanche en université d’été à Port-Leucate (Aude), en prélude au discours qui officialise son entrée en campagne électorale. Pas facile de prendre la parole après le charismatique facteur, déguisé en mentor d’« un des rares candidats qui sait de quoi il parle quand il évoque les conséquences de la crise capitaliste », ironise Olivier Besancenot. Mais au-delà de l’ironie, le NPA affiche comme un étendard sa fierté d’avoir choisi un ouvrier, salarié chez Ford. « Les autres sont quasiment tous des politiciens professionnels », lâche Philippe Poutou. Lequel entend faire de l’annulation de « la dette illégitime » l’un de ses principaux axes de campagne. « Quand la Bourse va bien, nous n’en profitons pas, mais quand elle va mal, les capitalistes savent où nous trouver », s’exclame-t-il devant un public moins jeune, moins coloré, moins nombreux que l’édition université d’été 2010.
Mais un public toujours motivé pour « faire payer la crise aux capitalistes », un public à fond pour que « la question sociale » soit au cœur de la rentrée politique, alors que « tous les partis ont les yeux fixés sur l’échéance électorale », polémique Christine Poupin, l’une des porte-parole du NPA.
Un public acquis au discours radical. Mais toujours marqué par les déchirements qui ont éclaté à la conférence nationale du parti, en juin dernier. Certains des minoritaires (40 %), favorables à un dialogue avec le Front de gauche, ont boudé ce rendez-vous estival, dont Pierre-François Grond, l’ex-bras droit de Besancenot, aujourd’hui principal leader de la contestation interne. « On a assez souffert des tensions », tranche Philippe Poutou, qui lance toutefois un appel à une « campagne unitaire », sachant qu’une partie des militants a décidé de la boycotter.
D’autres veulent d’abord juger la tonalité du candidat et peser sur la campagne pour sortir le NPA de la « tentation isolationniste », selon Myriam Martin, la seconde porte-parole, désormais elle aussi dans l’opposition. Comme en écho, Philippe Poutou avertit : « Je ne suis pas un camarade ministrable pour un futur gouvernement de la gauche plurielle. » Une façon de répondre à ceux qui, au sein de son parti, entendent reprendre le flambeau de l’unité de la « gauche radicale » pour construire une « vraie opposition de gauche » aux élections législatives.
Mina Kaci