Reprendre pied à la gauche de la gauche. Cinq mois après son congrès fondateur et un mois après le cavalier seul des européennes, le Nouveau Parti anticapitaliste (NPA) d’Olivier Besancenot veut la jouer «unitaire», plus collectif.
Rencontres bilatérales avec les forces de la gauche radicale, dont le Parti communiste (PCF) et le Parti de gauche (PG) de Jean-Luc Mélenchon ; candidatures et listes communes PCF-PG-NPA dans certaines élections partielles comme à Aix-en-Provence ; volonté affichée de «listes autonomes et indépendantes» avec le PCF et le PG pour le premier tour des régionales au printemps 2010… Une leçon tirée des 4,9 % (et aucun député) obtenus aux européennes quand leurs camarades du Front de gauche (PCF, PG et autres formations de la gauche radicale) ont atteint 6 % et envoyé 4 députés à Strasbourg ?
«On ne change pas de politique, assure Pierre-François Grond, membre de la direction du NPA. A chaque fois que les conditions sont réunies, nous avons été pour des accords unitaires», insiste-t-il. Avant les européennes, ledit accord avec le PG et le PCF ne s’était pas fait. Le NPA exigeant alors que l’alliance s’applique aussi pour les régionales de 2010. Leurs partenaires avaient alors refusé.
10 % . Au sein du NPA, beaucoup avouent aujourd’hui plus facilement que le scrutin du 7 juin a douché pas mal d’illusions. «Les européennes ont permis de tirer la sonnette d’alarme. Tous ensemble on aurait pu faire plus de 10 % !», témoigne un militant de l’Yonne. Leila Chaibi, du collectif L’Appel et la pioche, membre du NPA, se montre plus directe : «On est nombreux à penser qu’on a fait un score bidon aux européennes. On n’a pas créé le NPA pour être un LO bis. Vouloir se rassembler pour les régionales, je trouve ça très bien.»
«Je pense qu’ils admettent qu’il n’y a aucun avenir dans leur logique de concurrence boutiquière», affirme un ancien membre de la Ligue communiste révolutionnaire (LCR), à l’époque membre de la minorité unitaire. Un positionnement plus proche des aspirations des nouveaux adhérents, non issus de la LCR, que l’on dit déçus de la non-union du NPA avec le PCF et le PG aux européennes. Ainsi, pour éviter une hémorragie de ses militants et gagner des électeurs lors du prochain scrutin, le NPA a décidé de rentrer dès maintenant dans les discussions.
«On sent que les choses évoluent, observe François Delapierre, délégué général du Parti de gauche. Le NPA se positionne clairement pour des fusions techniques au second tour des régionales, y compris avec le Parti socialiste (hors alliance avec le Modem) pour battre la droite. C’est nouveau. Tout comme la présence d’Olivier Besancenot dans les délégations…»
Exécutifs. Une manière pour le leader du NPA d’occuper le terrain, de poser d’entrée ses conditions pour un rassemblement. Par exemple, le refus, en cas d’alliance, pour tout élu d’une «liste autonome unitaire»,de participer aux exécutifs avec le PS dans les régions.
Un message clair envoyé à la direction du PCF : «Faites le bilan de votre participation dans les exécutifs régionaux avec les socialistes et tirez-en les conséquences.»
Cambouis. Gêné par cette exigence, la direction du PCF joue la carte du «contenu». «Je dis au NPA : discutons sur le projet et si on est d’accord, alors allons-y ensemble !», a lancé mercredi la secrétaire générale du PCF, Marie-Georges Buffet. «Il faut forcer le NPA à mettre les mains dans le cambouis», insiste un autre responsable communiste qui ne voit pas le NPA prêt à bouger de ses positions. Christian Picquet, ancien de la LCR et membre du Front de gauche sous l’étiquette de la Gauche unitaire, craint plutôt une «manœuvre» pour «essayer de diviser le Front de gauche et d’expliquer ensuite qu’aucun accord n’était possible». Même au sein du NPA, certains sont mal à l’aise face à la stratégie de leur direction : «On pense que ça peut valoir le coup d’y aller sans imposer d’emblée une non-participation aux exécutifs régionaux», dit Yann Cochin, de la minorité unitaire du NPA.
Dans ce ménage à trois, les responsables du parti de Mélenchon se posent en «facilitateurs de l’unité», mais donnent la priorité à leur alliance avec le PCF dans le Front de gauche. «Le plus simple est de se dire qu’ensemble on peut aussi être devant le PS !», souhaite François Delapierre. D’ici l’automne, tous s’accordent à dire que le paysage de la gauche «va bouger» et que les décisions se prendront à ce moment-là. Premier élément de réponse fin août, lors de l’université d’été du NPA à Port-Leucate. Olivier Besancenot et les siens ont invité sur place PG et PCF à «poursuivre les discussions».
Par Lilian Alemagna.