PRÉSIDENTIELLE - Jusqu'en mars, le candidat du NPA, toujours ouvrier à l'usine Ford de Blanquefort, n'a que deux jours par semaine de disponibilité pour trouver 500 signatures, rencontrer les Français et répondre aux médias. Mardi, il a reçu 20 minutes au siège du NPA de Montreuil...
Dimanche, Hollande a eu des paroles fortes contre la finance, y croyez-vous? Il était obligé d’apparaître comme quelqu’un qui se situe à gauche. Ce ne sont que des déclarations et ce qui compte c’est la politique qui sera menée. Ce discours anti-capitaliste, Sarkozy aurait pu le prononcer. Il faut que Hollande dise quelles mesures concrètes il prendrait, quelle réponse il apporterait au chômage, à la précarité, au démantèlement du service public. Là, c’est un discours sans engagement précis. Ce n’est pas rassurant mais ce n’est pas surprenant non plus: le PS s’inscrit totalement dans la logique libérale.
En cas de second tour entre le PS et l’UMP, quelle serait votre attitude? Sur la dette, les déficits, le coût du travail, la mondialisation, le PS et l’UMP se retrouvent sur les mêmes politiques. Mais on souhaite que Sarkozy et sa bande dégagent. On fait la distinction. Mais en cas d’élection du PS, le problème fondamental ne sera pas réglé: on aura toujours une politique libérale, qui sera juste peut-être un peu moins antisociale. Tout est dans la nuance alors qu’il y a une urgence sociale. Le NPA, et la LCR auparavant, ont toujours pris position au second tour. Ce sera pareil cette année.
Les Français semblent résignés. Vous étonnez-vous que les plans de rigueur ne provoquent aucune grande manifestation? D’un côté la droite et le Medef mènent leur bataille et en face on a des mollassons. Je ne parle pas que du PS, mais aussi des directions syndicales. Quel est leur intérêt d’aller au sommet social? Ils auraient dû le boycotter. Leur participation affaiblit la résistance. Il y a un manque d’espoir, de perspective. Pourtant, il y a des conflits un peu partout, à Lejaby, chez Fralib. Comment faire converger tous ces combats pour changer le rapport de force? Il faudra un déclic.
Que proposez-vous pour empêcher l’hémorragie des emplois industriels? On est pour l’interdiction de tous les licenciements et des délocalisations. Réquisitionnons les entreprises qui veulent délocaliser. Que l’Etat prenne ses responsabilités en assurant la continuité de l’activité. Et s’il ne joue pas ce rôle protecteur, discutons de l’expropriation par les salariés. C’est ce que veulent faire les salariés de Fralib à Marseille. C’est une mesure concrète.
L’Etat en a-t-il les moyens? Nous financerions cela pas un fonds de sécurité, qui serait alimenté par les grosses entreprises capitalistes. Stoppons le paiement des intérêts de la dette qui coûtent 48 milliards par an, revoyons la fiscalité en remettant l’impôt sur les sociétés à 50 %. Total ne paye même pas d’impôts… Finis les cadeaux fiscaux. Il faut faire basculer le pognon vers les plus pauvres.
Pourquoi l’extrême gauche n’arrive-t-elle pas à capter cette colère? On peut dire que le message n’est pas passé. Le véritable problème est que la crise fragilise tout le tissu social. Il faut se battre ensemble. Tout se désagrège, les services publics, les syndicats, les associations et l’individualisme l’emporte. A écouter l’UMP et le FN, ce sont les immigrés et les ouvriers qui sont responsables de tout. Très peu de gens leur expliquent que c’est le capitalisme qui est fautif. Ce ne sont pas nos petites voix, celle de Artaud et la mienne qui font contrepoids.
Comment expliquez-vous que le FN attire le vote ouvrier? Cela fait mal. Comment le FN a-t-il réussi à faire croire qu’il s’intéresse aux ouvriers? Malheureusement dans le désespoir, il y a l’attente d’un sauveur. Pourtant Le Pen n’est pas différente des autres. Elle est une pro de la politique, riche, qui fait dans la démagogie sociale. C’est de l’escroquerie.
Regrettez-vous de ne vous être pas allié avec le Front de gauche? Oui, mais il y a des divergences politiques que l’on ne peut pas effacer. Mélenchon pense que l’on peut travailler avec le PS. Pas nous. Une nouvelle gauche plurielle serait catastrophique. Retrouvons-nous au moins sur des combats sociaux communs, dans la rue. Car le favori PS n’apportera pas de solutions.
Où en êtes-vous des 500 signatures? Nous en avons 371. Nous sommes dans le même timing qu’en 2002 et 2007. Nous passons notre temps à convaincre les maires PS de passer outre les consignes de leur parti pour ne pas nous donner nos signatures.
Propos recueillis par Matthieu Goar et Maud Pierron