Publié le Dimanche 26 juin 2011 à 22h34.

Poutou: "Le Pen dégage". Interview de Philippe Poutou (JDD le 26 juin)

Après une conférence nationale tendue, Philippe Poutou succède à Olivier Besancenot comme candidat du NPA pour l'élection présidentielle. Inconnu du grand public, mal connu par une partie du NPA, cet ouvrier du secteur automobile, syndicaliste CGT et un temps à Lutte Ouvrière, doit désormais mettre le parti anticapitaliste en ordre de bataille. Rude tâche. Coaché dimanche matin par Olivier Besancenot avant d'affronter sa première conférence de presse, ce quadragénaire livre au JDD.fr son analyse sur les combats qui l'attendent.

Vous n'êtes pas porte-parole. Vous n'appartenez pas à la direction du NPA. Êtes-vous surpris d'avoir été choisi comme candidat? Non. On en discute depuis l'annonce de la non candidature d'Olivier [Besancenot] mais ce n'est pas forcément un cadeau. En tout cas, ce n'est pas une démarche personnelle mais un choix collectif. C'est très compliqué pour nous : nous sommes des salariés, on milite au quotidien mais la politique, ce n'est pas notre job. Au NPA, personne ne court après la candidature. C'est peut-être la différence avec le PS où tout le monde fait la queue pour y aller. Nous, on disait de celui qui allait être choisi : "pas de bol c'est tombé sur lui." Je rigole un peu, j'étais volontaire quand même.  On va essayer de mettre en place une campagne collective avec plusieurs visages. Il n'y a pas de super candidat.

Succéder à Olivier Besancenot, est-ce compliqué? Forcément, oui. Mais c'est difficile pour nous tous, ce n'est pas mon défi personnel. Olivier Besancenot a une popularité qui nous aurait simplifié la tache.  On se reportait sur lui, on lui faisait confiance et puis il continuait le boulot. Sauf qu'humainement, pour lui,ce n'est pas possible. Nous ne sommes pas des professionnels de la politique.

Au sein du NPA, le débat a été tendu. Est-ce qu'aujourd'hui le NPA est en ordre de marche pour 2012? Un peu plus de la moitié du NPA est en ordre de marche. Il y a une situation de crise au NPA, on ne peut pas la nier. Comment on gère la relation avec le Front de Gauche ou avec ce qu'on appelle la gauche radicale? Cela fait partie des débats que l'on a entre nous . Est-ce que ça veut dire qu'il y a des différences d'orientations profondes? Certains le pensent, d'autres pensent que ce n'est qu'une question tactique.  On nous promet la crise du parti pour de bon. On se dit que la campagne sera l'occasion de se retrouver ensemble. La crise que l'on vit, tout le monde la vit dans les organisations militantes.

Quelles seront les grandes lignes de votre campagne? On veut se faire le porte-parole de l'ensemble des salariés et des exploités, de tous ceux qui se battent au quotidien contre les reculs sociaux, contre la politique d'austérité.  Il y a aussi le combat écologique : on dénonce le nucléaire et on veut une politique de l'énergie qui dépende d'un service public et pas de groupes privés.

Un des autres axes est la lutte contre le Front National? On veut montrer que le FN est l'ennemi premier des salariés. Marine Le Pen et son parti sont des usurpateurs : ils veulent faire croire qu'ils ont le soutien des ouvriers. C'est une escroquerie. C'est toute la démagogie de l'extrême droite de s'appuyer sur le malheur et le désespoir des gens. Les salariés et les ouvriers peuvent être révolutionnaires et s'opposer à toutes ces idées de merde qui divisent les gens. On défend la régularisation de tous les sans-papiers. On a envie de reprendre les slogans des révolutions d'Afrique du Nord : le FN dégage. Le Pen dégage.

Pensez-vous que Jean-Luc Mélenchon puisse attirer des anticapitalistes? Oui, bien sûr. Nous avons des idées communes avec le Front de gauche. On représente en partie le même camp social. On peut regretter qu'on ne soit pas ensemble mais nous avons des désaccords importants, comme sur le nucléaire. Dans cette campagne, le Front de Gauche ne sera pas un adversaire même si on se souvient que Jean-Luc Mélenchon a été au gouvernement [comme ministre délégué à l’Enseignement professionnel sous Jospin).

Arthur Nazaret