Nous n’avons pas le choix, la rentrée sociale ne doit pas être « normale », la rue doit se faire entendre. Nous avons eu un été sans surprise : envolée des prix, montée du chômage, multiplication des plans de suppressions d’emplois ou de fermetures d’usines. Les mauvaises nouvelles s’accumulent tandis que la précarité et la pauvreté continue de s’aggraver. Derrière les chiffres il y a des drames humains, des gens qui souffrent. Heureusement, certains ne se résignent pas. Il y a les luttes, les résistances légitimes comme celles des salariés de Fralib ou de Sodimédical, qui durent depuis plus d’un an, celle des salariés de PSA, et la mobilisation à l'usine Ford, où je travaille.
Il y a aussi tous ceux qui s’opposent aux fermetures d’hôpitaux ou de maternités, aux suppressions d’enseignants Rased dans les écoles. Ceux qui refusent les projets néfastes pour l’environnement et la santé des populations comme à Notre-Dame-des-Landes, à Bures, à Clermont… Et puis il y a la colère dans les « banlieues » qui s'est exprimée lors des émeutes dans les quartiers populaires d’Amiens. Une colère légitime face à la brutalité de la crise, à l’humiliation et aux discriminations, face à une violence sociale marquée par la répression policière, à une République incapable d’assurer le respect pour tous. Il y en a marre de ce monde sans autre perspective que la dégradation du niveau de vie de la majorité de la population.
Marre de ce monde capitaliste qui détruit les services publics, les collectifs, la vie sociale. Marre de cette crise qui permet aux grosses fortunes de s’enrichir en exploitant les classes populaires. Il n’y a pas de fatalité et le « désordre » provient de cette organisation économique dirigée par les capitalistes et les financiers. Les choses doivent changer radicalement.
Cette année, on a réussi à régler nos comptes avec un gouvernement réactionnaire, anti-social et raciste. C’est Sarkozy et sa bande que nous avons dégagés. Mais les élections ne font pas tout. Car, à la place, le nouveau gouvernement de « gauche » mène une politique sensiblement identique. Ce gouvernement avait promis une seule chose : « le changement, c’est maintenant ! ». Et bien il a déjà renié son engagement ! Les patrons continuent de fermer des usines ou de supprimer des emplois, les salaires n’augmentent pas contrairement aux prix des fruits et légumes ou des carburants, les camps des Roms continuent d'être démantelés et les sans papiers de se faire expulser. Le changement, le vrai changement viendra d’en bas, du monde des opprimés, car nous défendrons collectivement nos emplois, nos conditions de vie et de travail, notre droit de vivre dignement et décemment. Nous devons retrouver la confiance en nous-mêmes, dans nos propres forces. Ce n’est pas évident tant nous avons subi de reculs ces dernières années, pris des coups, tant nous avons été divisés et éparpillés. Pour cela, nous avons besoin de reconstruire les réseaux militants, recoller les morceaux du mouvement social et donc faire tomber les barrières entre les milieux militants associatifs, syndicaux et politiques.
La colère existe mais cela ne suffit pas. Il nous faut espérer à nouveau et penser que nous pouvons agir ensemble ; que le progrès social, une vie meilleure pour tous, c'est possible. Il nous faut aussi une perspective politique claire : celle de répartir les richesses entre tous, donc celle de faire payer les grosses fortunes, de combattre le capitalisme et d’imposer une économie qui réponde aux besoins des gens et non pas aux profits d’une minorité, une économie qui préserve notre santé et notre environnement.
Seules des solutions radicales peuvent répondre à l’urgence sociale. Concrètement, il faut stopper les délocalisations, les fermetures d’entreprises, les suppressions d’emplois, dans le privé ou dans le public. Il faut annuler la dette publique illégitime et créer un monopole public bancaire contrôlé par les salariés qui mettrait le système de crédit au service de la société. Les revenus pour tous doivent être augmentés, c'est un revenu minimum de 1700 euros dont nous avons besoin. Enfin, il faut un service public de l’énergie qui rompt avec la logique de rentabilité et qui permette de sortir du nucléaire dans les dix ans.
Il n'y a rien à attendre du gouvernement Hollande-Ayrault, qui ne veut pas affronter les financiers et les capitalistes, et qui donc ne pourra pas répondre à l'urgence sociale. C’est pour cela que l'objectif politique de cette rentrée, c'est de construire une opposition qui soit à la gauche de ce gouvernement. On n'a pas d'illusions à se faire et nous n'avons pas le droit d'attendre. Nous avons déjà fait l'expérience de la gauche au pouvoir et nous savons comme ça peut finir. Il ne faut pas que les déceptions finissent à nouveau en favorisant le retour d'une droite dure voire d'une extrême droite. Nous avons déjà fait l’expérience de gouvernement dit de gauche. Nous savons qu’il ne faut pas ni attendre ni tergiverser. Nous savons que sans ça, c’est la droite et l’extrême droite qui profiteront des nouvelles déceptions. Il nous faut donc préparer une riposte unitaire, une mobilisation générale des salariés, de la population. C'est possible avec l’ensemble de la gauche de la gauche, avec les associations et les syndicats.
Le NPA est de ceux qui appellent à la manifestation unitaire du 30 septembre contre la ratification du Traité européen sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG), nous sommes de ceux qui veulent préparer une marche nationale contre les licenciements ou encore reconstruire des collectifs unitaires pour l'égalité des droits et contre le racisme. Pour stopper l'austérité, la dégradation de nos conditions de vie, la montée du racisme et des discriminations, alors la rue doit se faire entendre…maintenant.
Philippe POUTOU