Alors que l’électorat le plus réactionnaire s’était déplacé pour élire un M. Propre sur jouant le traditionalisme catholique et la probité, les multiples révélations de ces derniers jours (détournement de fonds public à hauteur de 900 000 euros, emplois fictifs pour sa femme et ses enfants, etc.) viennent lourdement compromettre le maintien même de la candidature de Fillon.
Au-delà du cas du champion de la droite, cette affaire révèle surtout que ce petit monde de politiciens considèrent le plus souvent que les caisses de l’État sont à leur disposition, et qu’ils peuvent utiliser l’argent public comme ils utilisent leurs voitures de fonction... Les mêmes qui sont à l’origine ou soutiennent toutes les attaques sociales contre le monde du travail, qui justifient tous les licenciements et s’insurgent contre les allocations accordées aux chômeurs, trouvent normal de se servir grassement dans les caisses. Ils s'étonneraient presque qu'aujourd'hui on leur demande des comptes concernant une rémunération équivalente à plus de 40 ans de salaires d’un smicard !
Tout aussi révélateur l'ensemble des responsables politiques qui évitent soigneusement tout « lynchage » : on les a pourtant connu plus en verve, par exemple contre les salariés d'Air France, de Goodyear ou contre les manifestants anti-loi travail... Car, au-delà de la dimension presque amusante de Fillon l’arroseur-arrosé, ces « révélations » éclairent surtout le fonctionnement de tout un système politique au service d'une minorité. Des députés qui disposent d’une rémunération scandaleuse et de 10 000 euros mensuel à leur disposition pour leurs attachés. Des sénateurs de droite qui puisent depuis des années dans une cagnotte connue de tous. On a bien affaire à un système, népotique ou non, qui bénéficie à tous les élus du Parlement... Jusqu’aux champions des prétendues « mains propres », Dupont-Aignan et le Front national, aussi silencieux que les autres. Il faut dire que le FN a actuellement fort à faire avec un Parlement européen qui exige le remboursement de 1,1 million d'euros ayant servi à rémunérer des emplois fictifs !
Tout cela ne peut que nous renforcer à défendre, dans cette campagne présidentielle et au-delà, des exigences démocratiques élémentaires pour balayer ce système corrompu : suppression de la Présidence de la République et de ses pouvoirs exorbitants, suppression du Sénat (cette assemblée de notables élus par les notables), instauration de la proportionnelle intégrale, droit de vote et éligibilité à toutes les élections pour les résidents étrangers, interdiction du cumul des mandats limités à deux consécutifs dans la même fonction, indemnité correspondant au salaire moyen d’un ouvrier ou d’un employé (alors qu’un député touche 13 500 euros brut par mois, sans compter le paiement des collaborateurs, la gratuité des transports et des frais de communication, son bureau au palais Bourbon…). Bref, mettre enfin à bas une Ve République à bout de souffle.
Mais ces exigences démocratiques élémentaires imposent aussi de s’attaquer aux lieux réels de pouvoir. Ainsi, les banques et les grands groupes capitalistes, dont les dirigeants ne sont désignés que par leurs plus gros actionnaires, détiennent un pouvoir bien plus réel que les assemblées élues. Car la démocratie réelle, ce n’est pas de choisir tous les cinq ans des représentants, c’est être maître au jour le jour des décisions vitales pour sa vie quotidienne - dans l’entreprise, la ville, le quartier, etc - sans déléguer ce pouvoir à de prétendus experts ou spécialistes.
Pour une rupture démocratique, pour prendre nos affaires en main, il y urgence !
Bordeaux, le 2 février 2017