L’affaire d’islamophobie au lycée Ravel ne cesse de prendre de l’ampleur. Le 28 février, un chef d’établissement interpelle violemment une élève de BTS pour lui demander de retirer son sous-hijab, qu’elle enfilait afin de se rhabiller à la sortie du lycée. Alors que la jeune femme doit prendre un moment pour retirer le nœud du bonnet, celui-ci s’en prend violemment à elle au point que des élèves devraient s’interposer pour interrompre le proviseur. Le proviseur a ensuite démissionné, alléguant des menaces qui pèseraient sur sa sécurité. Des menaces bien entendu condamnables.
Le geste du chef d’établissement est d’abord celui d’un personnel de l’Éducation nationale pour qui les dispositions islamophobes de l’institution scolaire ont paru justifier la violence sur une élève. La légitimation d’une forme d’intolérance à la visibilité de l’islam, par des dispositifs légaux, n’a pas seulement pour effet d’opprimer les mulsumanEs mais aussi d’encourager la violence islamophobe. Nous affirmons notre soutien à l’élève concernée, ainsi qu’à tous les élèves mulsumanEs qui subissent l’islamophobie d’État entérinée par la loi de 2004.
La médiatisation de cette violence, nécessaire pour dénoncer les conséquences réelles des règlements administratifs discriminatoires, a suscité des réactions outrées parmi les populations visées par l’islamophobie d’État « et d’atmosphère » au quotidien.
Les menaces sont graves et ne doivent pas être minimisées, elles manifestent des tensions réelles et croissantes qui sont le résultat de la discrimination accrue dans notre pays. Pour autant, il ne s’agit plus de « ne pas faire d’amalgame » mais de refuser l’inversion des responsabilités. Le parallèle qui est réactivé dans les médias avec l’assassinat de Samuel Paty est intolérable car il représente une instrumentalisation de sa mort pour silencier la dénonciation de l’islamophobie. Invitée à réagir à la mise en retrait du proviseur, la jeune fille agressée s’est dit « désolée pour lui ». Elle n’est pourtant en rien responsable des menaces, venant d’individus des Hauts-de-Seine, sans lien avec elle. Une fois encore, les musulmanEs, même victimes d’oppression, sont somméEs de se solidariser avec leurs agresseurs.
Depuis le début du mois de mars, l’escalade islamophobe est insoutenable : le soutien de la classe politique, du PS à l’extrême-droite, au chef d’établissement manifeste l’aggravation de la cécité islamophobe dans notre pays. Une étape est franchie par le Premier ministre, Gabriel Attal, qui non content d’avoir intensifié la pression islamophobe avec l’interdiction des « signes religieux par destination » et non plus seulement « ostentatoires », c’est-à-dire visibles, affirme porter plainte contre l’adolescente pour « dénonciation calomnieuse ». La ministre de l’Éducation, Nicole Belloubet, y ajoute la mise en place de « d'une force mobile scolaire » pour « soutenir » les chefs d’établissement dans leur mission islamophobe.
Nous dénonçons la réaction sécuritaire et raciste du gouvernement Attal et nous nous opposons à cette transformation de l’Éducation nationale en institution idéologique dont la priorité selon le gouvernement est l’application de lois islamophobes. Nous affirmons notre soutien aux élèves discriminéEs, aux enseignantEs et personnels d’éducation qui luttent pour une société libre d’oppressions et s’opposent à la mise au pas raciste du service public.
Montreuil, le 3 avril 2024