AJACCIO, 26 mai 2009 (AFP) - "Candidat d'ouverture" aux européennes sur la liste du nouveau parti anti-capitaliste (NPA) dans le sud-est, Alain Mosconi, 42 ans, leader de la section marins du Syndicat des Travailleurs Corses (STC), est considéré comme un des hommes les plus puissants de l'île.
Nez busqué, moustache et bouc taillés au cordeau, le cuistot entré à 18 ans à la Société nationale Corse-Méditerranée (SNCM), se présente comme "indépendantiste et très à gauche". Il a renoncé à son poste de secrétaire national maritime du STC à l'ouverture de sa campagne. Revenu à la base, mais toujours très écouté par les marins, il conserve la capacité de paralyser l'île en donnant le coup d'envoi à ce qu'il appelle "des actions d'envergure", le blocage des navires assurant les liaisons avec le continent. Une perspective qui donne des cauchemars aux pouvoirs publics à chaque début de conflit en Corse.
En septembre 2005, il a accédé à la notoriété en prenant, avec une soixantaine de marins, le contrôle, à Marseille, du Pascal Paoli, un cargo mixte de la SNCM qu'il a conduit à Bastia, "pour le rendre à la Corse". "Ce n'était en rien un acte de piraterie, rien à voir avec la Somalie, il n'y avait pas de demande de rançon, pas de kalachnikov, nous nous sommes juste réappropriés notre outil de travail", dit-il à l'AFP. Le coup de force s'est achevé le 28 septembre au petit matin dans la rade de Bastia par une intervention héliportée du GIGN, diffusée sur les télévisions du monde entier. "Ce jour-là, j'ai supplanté mon homonyme" - le nageur médaille de bronze aux jeux olympiques de Mexico en 1968 - "mais il reste plus titré, celui qui entrera dans l'Histoire", rigole Alain Mosconi.
Décrit par ses amis comme un "bon vivant", "marrant" et "sympa", il est aussi connu pour ses accès de colère. "Il aime bien commander, c'est un homme à poigne, comme tous les leaders", constate un ami indépendantiste. "Dans le feu de la discussion, il peut voir rouge et avoir des mots très durs", se souvient un militant. Les journalistes qui ont couvert le conflit ayant entraîné le détournement du Pascal Paoli ont en mémoire ses coups de gueule et les coups de poing assourdissants assénés sur la table de la salle de négociations pour ponctuer ses propos, qui s'entendaient à travers la porte fermée.
Alain Mosconi n'a pas l'intention de renoncer à l'action syndicale. "Au NPA, nous avons mis en place un système de +tourniquet+ permettant aux trois premiers de la liste de siéger un tiers du temps: le STC, j'y suis depuis 1986 et je compte bien y passer encore des années". S'il est très populaire chez les marins, il est nettement moins apprécié dans les instances dirigeantes du STC où, sous couvert d'anonymat, on lui reproche son "autoritarisme" et un goût immodéré pour les médias.
"Dans les syndicats aussi, on n'aime pas beaucoup les gens qui relèvent la tête", rétorque le syndicaliste-candidat, évoquant "des grincheux depuis trop longtemps dans leurs fauteuils". Dans l'affaire du Pascal Paoli, la SNCM a retiré sa plainte. Et deux jours après le début du détournement, en raison du "caractère syndical de l'action menée", l'Assemblée de Corse - dirigée par une majorité UMP - a demandé, à l'unanimité, l'arrêt des poursuites judiciaires à l'encontre d'Alain Mosconi et de trois autres "pirates". L'action publique se poursuit néanmoins. Si les qualifications de séquestration et de détournement de navire sont retenues, il risque 30 ans de réclusion. PhC/tm/so/phi
Par Philippe COSTE