«Quand on a un an, on apprend à marcher. C’est normal de se prendre des gadins.»
Les chutes connues en 2010 par le Nouveau parti anticapitaliste (NPA), Olivier Besancenot les prend pour expérience et avec ironie. Revers électoral aux régionales (3,4%), polémique autour d’une candidate portant le foulard, départs de militants, espace politique et médiatique vampirisé par Jean-Luc Mélenchon… Pour sa deuxième année, l’ex-LCR a connu une existence chahutée. Mais remis d’aplomb par les mouvements sociaux de l’automne, voilà Besancenot et le NPA prêts, en 2011, à trouver un équilibre nécessaire pour préparer 2012.
Quand Besancenot veut transmettre le mégaphone
Au prochain congrès de février, à Montreuil (Seine-Saint-Denis), Olivier Besancenot ne devrait plus êtreporte-paroledu NPA. En juin, dans Libération, il plaidait, après dix ans à ce poste, pour une «rupture», une «place nouvelle dans la direction» afin de sortir de la personnalisation autour de lui. «Il faut se faire violence et accepter d’avoir un certain temps moins de représentation médiatique pour faire émerger un nouveau ou une nouvelle porte-parole, voire plusieurs»,expliquait-il. Myriam Martin, chef de file du NPA dans le Sud-Ouest et Omar Slaouti, un des leaders du parti en Ile-de-France, pourraient lui succéder, suppléés par deux autres «camarades».«Ce sont plus des sollicitations que des autopromotions», précise Pierre-François Grond, du comité exécutif. Le nouveau rôle de Besancenot ? «Il y a deux écoles, poursuit Pierre-François Grond. Ceux qui disent qu’il doit aider les nouveaux porte-parole. Et ceux qui pensent qu’il ne doit pas les épauler car, sinon, il va les écraser.» L’intéressé partage cette dernière analyse, soucieux d’imposer aux médias et au grand public d’autres visages du NPA.
Alors qui en 2012 pour la présidentielle ?
Suivant cette logique de dépersonnalisation, Besancenot ne devrait donc pas concourir une troisième fois à la présidentielle. Mais, confie-t-il à Libération, le changement de porte-parole «sera déconnecté de la question de 2012». Car comment le NPA pourrait-il se passer de son meilleur joueur lorsque s’annonce, sur le même terrain, le médiatique Jean-Luc Mélenchon ? «Il faut arrêter de dire n’importe quoi… Olivier est le seul candidat possible, tranche un compagnon de route du NPA. Olivier est ligoté. Si le parti a un autre candidat, il ferait alors toute la campagne avec la question "pourquoi ce n’est pas Besancenot ?" Ce serait intenable et le choix d’Olivier apparaîtrait comme une désertion.»
Pour l’instant, la direction du NPA botte en touche. Le candidat ne sera désigné qu’en juin, lors d’une conférence nationale. Toute la question est de savoir si Besancenot, 38 ans en 2012, acceptera de porter le brassard de candidat une troisième fois. En 2007, il avait déjà dit niet avant d’accepter. «C’est vrai qu’il est le candidat naturel», relève Sandra Demarq à la direction. «En ce moment, il est comme nous tous, ajoute Grond. Il pèse le pour et le contre… La configuration de l’élection de 2012 est-elle la mieux à même de faire émerger quelqu’un d’autre ? On n’a pas encore la photo exacte de la présidentielle.» Qui sera le candidat du PS ? Où en seront le Front de gauche et Mélenchon ? Besancenot tempère : «Le casting, c’est en juin. Le scénario, c’est maintenant.»
Comment construire une «alternative anticapitaliste» ?
«Raccorder le temps social et le temps politique.» Besancenot en a assez des tentatives d’alliances avec les autres partis de la gauche radicale et des jeux de dupes avant chaque élection. Pour 2012, il veut s’atteler à la construction d’un «espace anticapitaliste plus large que le seul NPA» en «prenant appui» sur le «mouvement social».Satisfaite d’avoir réuni entre 700 et 900 personnes le 11 décembre à Montreuil pour un «bilan» de la mobilisation contre la réforme des retraites, la direction du NPA compte surfer sur les «luttes» pour réussir son congrès, prévu du 11 au 13 février - après deux reports en novembre puis en décembre. Ce congrès s’annonce corsé dans un parti coupé, sur les questions stratégiques, en trois - voire quatre - courants et déchiré sur les questions de «laïcité-religion-féminisme».
Une fois le congrès passé, le NPA mise sur les «carrefours de l’alternative», dont Attac et la Fondation Copernic devraient être les organisateurs. Tous les partis de gauche, y compris, au PS, le courant de Benoît Hamon, seraient invités, aux côtés d’organisations syndicales et associatives, à participer à des débats publics sur des thèmes comme la fiscalité, la «répartition des richesses», la «démocratie sociale»… «L’initiative permet de discuter sur le fond en profitant des mois qui restent pour permettre à des militants syndicaux et associatifs de participer» aux débats pour 2012, explique Grond. Eviter aussi que le débat ne tourne qu’autour d’une question : Besancenot sera-t-il candidat ?
Lilian Alemagna