Pour l’après-Sarkozy, Olivier Besancenot a un candidat: Nicolas Sarkozy. Et si d’aventure la «gauche molle» sur un axe PS-Modem venait à l’emporter en 2012, ce serait quasiment kif-kif.
«C’est le pouvoir économique qui tire les ficelles. Tous ceux qui à gauche ont mis les mains dans le cambouis des institutions actuelles ont fini par faire des politiques de droite», assurait le leader du NPA dans Libération début février. Une façon de justifier l’indépendance absolue du NPA vis-à-vis du PS. Et de refuser de rejoindre le Front de gauche aux élections européennes avec le PCF et le PG, suspects de vouloir «aller à la soupe» aux élections régionales avec les «socio-libéraux» du PS.
«Gagnant-gagnant». D’où la stratégie actuelle de s’appuyer sur le modèle de la Guadeloupe - Besancenot y a défilé le 1er mai avec le LKP - pour faire du NPA un parti de luttes. «On n’est pas dans une logique d’alternance, mais d’alternative», rappelle Pierre-François Grond, un de ses proches.
En attendant le Grand Soir et le renversement du capitalisme, le bras de fer avec le président de la République a été jusqu’à présent du «gagnant-gagnant» pour les deux protagonistes. Le chef de l’Etat et l’UMP érigent Besancenot en leader de la radicalité pour diviser la gauche. «On va vous faire avec Besancenot ce que vous nous avez fait avec Le Pen», avait ainsi lancé Nicolas Sarkozy, le 7 juin 2008, à François Hollande, alors premier secrétaire du PS, dans un avion au retour de Beyrouth.
Hérissés. Un NPA à 10 % qui, en ne s’alliant avec personne, empêche la gauche d’être majoritaire ? La comparaison avec le Front national hérisse ces anciens trotskistes. «Le NPA n’a rien à voir avec le FN. 90% de nos électeurs vont voter à gauche au deuxième tour, quelles que soient les consignes du NPA. Cette comparaison est une insulte à nos traditions et une plaisanterie inventée par la gauche tiède pour masquer ses insuffisances et justifier son incapacité à s’opposer à Sarkozy», martèle Grond. Reste à évaluer les dégâts causés, notamment chez les nouveaux militants NPA, par le discours puriste de leur leader.
De son côté, Besancenot a vu tout le parti à tirer d’une stratégie «d’opposition frontale» en réponse à «la présidence de combat de Sarkozy», explique son entourage. Cette posture permet au facteur de Neuilly d’être régulièrement sacré «meilleur opposant» dans les sondages, au coude à coude avec Ségolène Royal. Elle pourrait néanmoins trouver ses limites. Ainsi le dernier baromètre OpinionWay-le Figaro, le 25 avril, a pour la première fois caractérisé les types d’opposition. «Besancenot reste l’opposant le plus radical et Royal la plus médiatique. Mais c’est Bayrou (21 %) et Aubry (14 %) qui sont jugés les plus constructifs», explique Denis Pingaud, patron de cet institut. «La radicalité de Besancenot est sympathique. Mais la crédibilité de ses solutions est proche de zéro, prévient Christian Picquet, toujours au NPA mais candidat du Front de gauche aux européennes. Il ne suffit pas d’appeler à la grève générale comme un derviche tourneur, il faut faire l’unité de la gauche de gauche. Sinon le spectre d’une alliance PS-Modem risque d’aboutir à la disparition de la gauche. Comme en Italie.»
Matthieu Écoiffier