LE MONDE 21.05.2014 à 11h16 • Mis à jour le 21.05.2014 à 12h40 Propos recueillis par Raphaëlle Besse Desmoulières et Caroline Monnot
Sa dernière candidature date des régionales de 2010. Olivier Besancenot, porte-parole du Nouveau Parti anticapitaliste, a choisi les européennes pour revenir au premier plan en étant tête de liste en Ile-de-France.
Pourquoi revenir aux élections européennes ?
Olivier Besancenot : J'ai délaissé la scène électorale comme candidat, pas comme militant. Aux européennes, la spécificité est d'avoir des listes collectives qui n'ont pas les inconvénients politiques que j'ai cherché àdénoncer. Ce qui m'a décidé, c'est aussi l'urgence sociale et politique : la crise de représentation, la percée de l'extrême droite. Et en même temps, les éléments d'espoir, comme la manif du 12 avril que nous avons co-organisée dans le cadre d'un collectif où, pour la première fois, il y avait une jonction entre une partie de la gauche sociale et la gauche non gouvernementale. La séquence n'est pas tout à fait la même qu'au début du quinquennat où l'ultra-droite, voire l'extrême droite fascisante, avait toute la visibilité du rapport de force.
Pourquoi avoir proposé un accord au Front de gauche et si tardivement ?
Nous dire que ça arrivait trop tard, c'est une bonne blagounette. LO n'a pas voulu en entendre parler. Et négocier avec le Front de gauche au moment des municipales, c'était impossible. A Paris, il fallait négocier avec qui ? Ceux qui se présentaient avec Anne Hidalgo ? Ou ceux qui se présentaient contre ? Le Front de gauche a préféré maintenir son unité interne. Avec un point commun entre la direction du PCF et du PG, à savoir la volonté deregarder davantage du côté de la gauche du PS et d'EELV que vers nous.
En quoi vous distinguez-vous d'autres listes ?
Nous ne sommes pas là pour faire de la figuration. Ce qui nous identifie, c'est d'être les plus à gauche contre le gouvernement et sur la question européenne de maintenir un cap anticapitaliste et internationaliste. De refuserl'Europe libérale et tout ce qui ressemble à une tentative de repli nationaliste.
Qui est dans ce repli ?
La droite court après l'extrême droite et la gauche court après la droite. Raison pour laquelle la gauche radicale doit se prémunir de basculer dans le souverainisme dans lequel se niche le repli nationaliste. Au Front de gauche, les récentes déclarations sur l'euro font débat. Mettre un doigt là-dedans, c'est renforcer un courant qui ne sera pas le nôtre. La campagne se résume à un faux débat pour ou contre l'euro, eurosceptiques contre eurofanatiques. C'est un débat dangereux. Il faut sortir des traités existants mais en gardant le meilleur de ce qu'il peut y avoir dans les droits sociaux et démocratiques pour chaque pays. L'échelle nationale ne reste pas la solution.
Comment expliquez-vous que ce soit le FN qui parvienne à occuper cet espace de mécontentement ?
Ce qu'on entend en permanence, c'est : « Cela ne peut pas être pire. » Le discours du FN constitue à dire depuis vingt-cinq ans : « L'UMP et le PS, c'est la même chose. » Qui peut dire le contraire aujourd'hui ? Ils se disent antisystèmes mais Marine Le Pen aspire à ce que son parti devienne le premier du système qu'elle dénonce soi-disant. On reste dans le discours de délégation. En période de crise, c'est plus facile de dire : « Votez pour moi, je vais régler tous vos problèmes. » Plutôt que de dire comme nous : « Il faut se représenter nous-mêmes. »
Le Grec Alexis Tsipras est-il votre candidat à la présidence de la Commission ?
Notre candidat est Anzoumane Sissoko, le président de la coordination des sans-papiers. Dans ce qu'on dénonce de l'Europe, il y a l'aspect Europe de Schengen, Europe-forteresse. On veut aussi dénoncer cette mise en scène ridicule autour de l'idée que l'UE serait en train de se démocratiser à mort, car ce serait le Parlement européen qui désignerait le président de la Commission. C'est une mascarade. Le Parlement européen reste l'assemblée la plus démocratiquement élue, mais celle qui a le moins de pouvoir.
Vous appelez à un vote sanction contre le gouvernement…
On est contre la droite, l'extrême droite et on pense qu'il faut un vote sanction du gouvernement PS-Medef.
Manuel Valls a annoncé des mesures fiscales pour les ménages les plus modestes…
C'est une enveloppe électorale à laquelle, j'espère, personne ne croit. On multiplie les effets d'annonce mais, la douloureuse, tout le monde va la payer. Avec ces 50 milliards d'euros d'économie, le PS agit dans le sens opposé historique à la gauche : ils prennent à la majorité de la population pour donner aux plus riches.