Olivier Besancenot sort de son mutisme. Silencieux depuis qu’il a été mis en minorité dans son propre parti au sujet de la stratégie à adopter pour les prochaines élections régionales, le facteur de Neuilly-sur-Seine, que l’on dit en perte de vitesse, contre-attaque. Il se félicite notamment de l’accord trouvé hier soir par les dirigeants du NPA (Nouveau Parti anticapitaliste) qui, à 70 %, ont décidé de déposer des listes autonomes au premier tour.
L’accord trouvé hier soir par les dirigeants du NPA vous satisfait-il ? Olivier Besancenot. A l’heure du sommet de Copenhague, c’est la preuve que la température baisse, au moins chez nous… Les adhérents étaient partagés, mais la direction a réussi à faire une synthèse, même si tout n’est pas réglé. Le NPA est désormais en ordre de bataille pour affirmer nationalement l’existence d’une gauche anticapitaliste et indépendante lors des élections régionales, sous la forme de liste NPA ouvertes, ou de listes unitaires dans quelques régions.
En partant en solo au premier tour, le NPA ne contribue-t-il pas à son isolement ? A notre initiative, nous avons entamé des discussions avec le Front de gauche (NDLR : PC et Parti de gauche de Jean-Luc Mélenchon) en faveur de l’unité. Aujourd’hui, c’est un constat de rupture. Les conditions que le Front de gauche veut nous imposer consistent à renier notre identité. Cogérer les régions avec le PS est, pour nous, impossible puisque nos programmes sont contradictoires. Nous proposons, par exemple, que les régions portent plainte pour détournements de fonds contre les grands groupes qui licencient plutôt que de les inonder d’aides publiques.
La stratégie que vous défendiez n’a obtenu que 36 % des suffrages des adhérents. Avez-vous été déçu ? C’est le jeu d’une consultation démocratique. On ne va quand même pas nous reprocher d’avoir donné la parole aux adhérents… Mais je ne vais pas me cacher derrière mon petit doigt : nous avons effectivement été mis en minorité.
Certains ont parlé de « désaveu »… La direction a montré ce week-end qu’elle pouvait aussi se rassembler sur une synthèse qui l’engage à 70 %. Le NPA existe. Il débat et doute quand la situation est complexe. Mais c’est le capitalisme qui est malade, pas le NPA.
Mais peut-on diriger un parti quand seulement 36 % des adhérents vous soutiennent ? C’était une consultation sur une question précise, pas un congrès sur une orientation globale. Il n’y a pas de désaveu.
Il y a un an, vous étiez « l’ennemi public du PS ». Aujourd’hui, on vous voit moins dans les médias… Mon moral n’est pas indexé sur la une des journaux, mais sur mon degré de révolte. Et si certains doutent encore, je le leur dis : ma volonté de combattre ce système politique et économique n’est absolument pas entamée. Mon énergie est intacte.
Neuf mille adhérents au moment de la création du NPA l’an dernier, plus que huit mille aujourd’hui : le NPA est-il en échec ? Un échec, non, même si la situation est plus compliquée pour nous. Nos solutions politiques sont liées à la capacité qu’une partie des salariés reprennent confiance dans leurs forces. Cela nécessite des victoires politiques et sociales comme lors de la mobilisation contre le CPE (NDLR : Contrat première embauche).Or les grandes mobilisations du début de l’année n’ont pas abouti. Le NPA est présent et sa première tâche est d’être un outil politique au service de la résistance sociale.
Après le succès de la votation citoyenne, la mobilisation contre le changement de statut de la Poste semble s’essouffler… La semaine est cruciale puisque les députés vont devoir voter. Elle doit servir d’électrochoc. On est en droit d’attendre de la gauche une bataille dans, mais aussi hors de l’Assemblée. Nous proposons d’ailleurs à l’ensemble de la gauche sociale et politique une grande initiative pour la défense des services publics au mois de janvier. Pourquoi pas une manifestation unitaire ? La seule force de ce gouvernement, c’est la faiblesse de la riposte.
Le « copenhaguisme aigu » de la classe politique française fait sourire la verte Cécile Duflot. Etiez-vous à votre place là-bas ? J’étais à l’autre sommet, celui de l’écologie sociale et des mouvements altermondialistes. On s’est opposés au sommet officiel, celui des puissants et des riches, qui fait croire au consensus contre le réchauffement climatique et qui recycle l’écologie en marchandise. Je suis donc à l’aise dans mes baskets.
Propos recueillis par Eric Hacquemand.