Sans surprise, le référendum organisé ce dimanche en Kanaky-Nouvelle-Calédonie s’est soldé par la victoire du « Non » à la question « Voulez-vous que la Nouvelle-Calédonie accède à la pleine souveraineté et devienne indépendante ? ».
Pas de surprise, même si l'ampleur de la victoire du « Non » est moindre qu'annoncé par les sondages. Le scrutin était en effet taillé pour un succès du « Non », avec notamment une liste électorale enregistrant le processus de colonisation à l’œuvre depuis un siècle et demi, qui a fait des Kanak une minorité dans leur propre pays, où ils représentent désormais moins de 40 % de la population totale.
À l’occasion de ce référendum, qui n’avait donc rien à voir avec un scrutin d’autodétermination, lequel devrait concerner en premier lieu le peuple colonisé, le camp indépendantiste s’était divisé entre un appel à voter « Oui » à l’indépendance et un appel à la non-participation. Les critiques à l’égard du processus initié à l’occasion des accords de Nouméa (1998) sont nombreuses, avec notamment le constat du maintien d’une situation d’inégalité structurelle en défaveur des Kanak. Ainsi, alors qu’en moyenne 17% des ménages calédoniens vivent sous le seuil de pauvreté, ce taux atteint 52 % dans les îles Loyauté et 35 % dans la province Nord,contre 9 % dans la province Sud, où la communauté européenne est la plus nombreuse.
Ainsi, dans un territoire riche en ressources naturelles, notamment minières, les inégalités sociales se confondent avec les inégalités ethno-raciales. Le « transfert des compétences » et l’effort pour le développement, promis par les accords de Nouméa, n’ont pas été au rendez-vous. Le Sénat coutumier parle de « peuple sinistré ».
Malgré les déclarations de Macron, qui a eu le cynisme, dans son allocution consécutive au référendum, de vanter la « république française » et ses « valeurs », le combat contre les dégâts du colonialisme français est donc loin d’être terminé, et il ne manquera pas de se poursuivre au-delà des résultats du scrutin. Il ne nous appartient pas de décider à la place des Kanak, mais une chose est toutefois certaine : nous serons à leurs côtés pour les luttes à venir, pour un réel exercice du droit à l’autodétermination et pour la justice sociale.
Montreuil, le 4 novembre 2018