Le NPA n'a plus les cartes en main. Son premier congrès qui s'est déroulé ce week-end à Montreuil (Seine-Saint-Denis), a été jugé «compliqué et difficile» par une responsable du parti d'extrême gauche, Myriam Martin. La formation représentée par Olivier Besancenot a perdu plus d'un tiers de ses militants depuis deux ans. Lors de la refondation de la Ligue communiste révolutionnaire en Nouveau parti anti-capitaliste, en février 2009, ils étaient entre 9000 et 10.000 militants. Ils ne sont plus aujourd'hui que 6000 environ.
Certes, l'enthousiasme des débuts a pu gonfler les troupes. «On a été ramené à ce qu'on pèse réellement», à soutenu Besancenot, qui reconnaît aussi la traversée d'une «crise existentielle» après les piètres résultats des européennes puis des régionales. Une crise qui semble encore en cours puisque dimanche sept membres de la direction sortante ont décidé de quitter le NPA, selon Léonce Aguirre du courant «unitaire», favorable à un rapprochement sous conditions avec le Front de gauche (Parti communiste, Parti de gauche, Gauche unitaire). Parmi eux, Leïla Chaïbi, du collectif L'Appel et la Pioche, rejoint le Parti de gauche.
Aujourd'hui, c'est Jean-Luc Mélenchon qui maîtrise le jeu à la gauche de la gauche. Probable candidat Front de gauche à la présidentielle si les communistes lui donnent leur imprimatur entre avril et juin, l'eurodéputé à la tête du Parti de gauche, à condition qu'il tienne son rythme, semble le plus à même de ratisser au plus large pour 2012, des Verts au NPA. Il ne manque d'ailleurs pas une occasion de le souligner, se disant dimanche matin «très déçu» des résultats du congrès du parti du NPA, avant même la fin des discussions. «Le NPA semblait signifier la fin de l'impuissance de l'autre gauche et de sa marginalisation dans des divisions incompréhensibles. C'est fini», dit-il, moquant «l'unité de la gauche anticapitaliste» voulue par le parti Olivier Besancenot. De fait, telle que définie par ce dernier, cette «unité» exclue le Front de gauche «que les docteurs de la vraie foi jugent impure», indique Jean-Luc Mélenchon.
Le NPA espère reprendre la main
Samedi, aucune motion n'a obtenu de majorité absolue lors des votes des participants au congrès du NPA, trahissant une certaine faiblesse du parti. Mais la motion de la direction - qui prône l'unité anticapitaliste mais en radicale indépendance du PS - a obtenue 41,88% des voix et celle du courant «identitaire», refusant toute discussion avec le reste de la gauche: 27,8%. Les «unitaires» ne sont arrivés qu'en troisième position avec 26,4% des voix. Le facteur de Neuilly n'a en outre pas caché ses sentiments vis-à-vis de Mélenchon: «il a la main tellement tendue qu'elle est presque crispée sur sa proposition.» «Envisage-t-il une seule seconde de ne pas être candidat et de laisser la place en 2012 à une personnalité du mouvement social qui ne soit leader d'aucun parti?», s'est-il interrogé. Et de le tacler, vendredi soir lors d'un meeting consacré aux révolutions en cours en Tunisie et en Égypte: «la révolution, ça ne saurait être une promesse de campagne.»
Olivier Besancenot reste cependant prudent et réservé dans ses critiques de l'ancien sénateur PS. D'abord parce qu'il va y avoir une lutte commune «contre Nicolas Sarkozy et sa politique» dans les prochains mois, et, prédit-il une «véritable mobilisation» des mouvements sociaux parce qu'on observe «en Tunisie et en Égypte, les premières ruptures politiques du cycle de la mondialisation qui, jusqu'ici, n'a connu qu'une rupture économique avec la crise».
Mais Olivier Besancenot a surtout décidé de faire le grand saut… Jusqu'après 2012. Le facteur, fatigué d'être seul à représenter son parti, va selon toute probabilité abandonner le mois prochain son poste de porte-parole à deux personnalités du NPA, dont une femme. Celui qui ignore le nom du coprésident du Parti de gauche - «Éric Coquerel? -Non, la député Martine Billard» - sait pertinemment que s'il ne se retire pas, les lumières resteront braquées sur lui. Il devrait ensuite, en juin, être désigné par son parti pour la présidentielle.
Et c'est après que le NPA espère reprendre la main. Pariant sur une «faiblesse» de Jean-Luc Mélenchon. «Oui, nous préparons l'après 2012. Notre hypothèse c'est que les socialistes vont l'emporter et que le Front de gauche sera dans le gouvernement», explique Pierre-François Grond. Or, pour ce membre de la direction de l'ex-Ligue communiste révolutionnaire, «qu'il s'agisse de Martine Aubry ou de Dominique Strauss-Kahn, leur politique économique libérale ne sera pas différente de celle de Nicolas Sarkozy». Pas question alors pour eux de «laisser l'opposition à Marine Le Pen». «C'est à ce moment là, dit-il, que le vrai rassemblement anticapitaliste de la gauche sociale pourra prendre toute son ampleur».
Sophie de Ravinel