Publié le Vendredi 30 mars 2012 à 13h08.

Au NPA, bataille autour de l'héritage financier de la LCR (Le Monde)

C'est la dernière bagarre devant la dépouille de la Ligue communiste révolutionnaire. Un peu comme celle que se livre une famille devant le cercueil d'un être qu'elle a jadis chéri et qui peut lui rapporter gros. Voilà des mois que la direction du Nouveau Parti anticapitaliste se déchire entre sa majorité pro-Poutou et sa minorité, la Gauche anticapitaliste, attirée par le Front de gauche de Mélenchon.

Samedi 24 mars, lors d'un conseil politique national, c'est sur une histoire financière que le ton est monté. Depuis sa dissolution en février 2009, concomitante avec la création du NPA, c'est encore la LCR qui touche l'aide publique allouée aux partis politiques en fonction des résultats obtenus lors des élections législatives de 2007.

2 MILLIONS D'AIDE PUBLIQUE

Pour gérer l'héritage - qui comporte aussi deux sociétés civiles et immobilières pour les locaux de l'organisation rue Taine (Paris, 12e) et Montreuil (Seine-Saint-Denis) -, un"comité de suivi"avait été mis en place. Vingt-trois personnes, tous membres à l'époque du bureau politique de la LCR, étaient censées assure rla transition.

Mais entre temps, au gré des départs de courants et de quelques figures historiques, ou des divisions internes du NPA, Olivier Besancenot et ses amis ont perdu la majorité. A la mi-mars, alors qu'il fallait décider de la répartition des 2 millions touchés au titre de l'année 2011, la guerre a été déclarée.

La minorité, la Gauche anticapitaliste de Pierre-François Grond et Myriam Martin (alors porte-parole du NPA), propose un partage au pro-rata de ce que représente chaque sensibilité: 35 % pour elle-même, soit 700 000 euros, 8 % soit 150 000 euros pour la Gauche unitaire de Christian Picquet, sorti depuis 2009 du NPA pour rejoindre le Front de gauche, et le reste, 1,15 millions pour la majorité actuelle du NPA.

RÉFÉRÉ AU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

La proposition, violemment combattue par Alain Krivine, ex-porte parole de la LCR, est soutenue par Christian Picquet et adoptée. Les ordres de virements sont alors transmis par le trésorier. Alain Krivine refuse de l'appliqueret tente, en ses qualités de président du comité de suivi, d'obtenir de la banque le contrôle de l'intégralité du compte.

La banque se rendant compte du pataquès possible bloque toutes les opérations. La direction tente alors la voie judiciaire: MM. Krivine et Besancenot déposent un référé au tribunal administratif pour"détournement de l'aide publique"et"fraude à la loi"et réclament l'invalidation de la décision du comité.

C'est dans cette ambiance que s'est réuni le conseil politique du NPA samedi. Le clash entre la majorité et la minorité est consommé quand la direction propose"pour solde de tout compte"une motion allouant 200 000 euros aux amis de M. Grond et la révocation du trésorier contre le retrait de la procédure judiciaire. Les responsables de la minorité quittent alors la séance.

NOUVEAU ROUND DE DISCUSSION

"Pour la première fois dans l'histoire du NPA, des désaccords politiques seraient réglés devant lajustice", s'indigne la Gauche anticapitaliste dans une tribune publiée dansTout est à nous!, l'hebdomadaire du parti. Aux yeux de la direction,"il s'agit d'établir un règlement global avec des camarades qui sont à la fois dans et à l'extérieur du NPA", faisant allusion à l'appel à voter Mélenchon qu'ont publié quatre dirigeants de la minorité.

Depuis la tension est légèrement retombée: la minorité a annulé ses ordres de virements et Alain Krivine son référé. Un nouveau round de discussions s'est ouvert pour tenter de trouver un compromis."Il faut à tout prix éviter des procédures judiciaires qui ajouterait du sordide à la décomposition politique du NPA", décrypte M. Picquet. Surtout que dans un mois, se posera une nouvelle question épineuse: combien de candidats par courant seront présentés aux législatives qui permettront à chaque sensibilité de toucher la prochaine dotation.

Sylvia Zappi