Interview de Raoul-Marc Jennar, ancien d’Oxfam, conseiller de Phnom Penh.
«Le Fonds monétaire international impose toujours aux pays qui sollicitent son aide des coupes budgétaires dans les secteurs clé comme la santé ou l’éducation. On dit qu’avec Dominique Strauss-Kahn, cela a changé. Mais cela n’est pas vraiment le cas. Le Cambodge l’illustre. Le FMI a ainsi toujours recommandé de diminuer le personnel des services publics. Le pays a été très loin dans le respect de ces consignes. Tellement qu’il n’y a plus d’hôpitaux publics. Seuls ceux qui ont de l’argent peuvent se faire soigner. Le Cambodge a été un très bon élève du Fonds monétaire international dans la réallocation des ressources vers le secteur privé… C’est valable partout où il intervient. Le FMI a conditionné son prêt en Hongrie à la réduction des salaires de la fonction publique, y compris dans les hôpitaux.
«C’est vrai qu’avec Dominique Strauss-Kahn, il y a eu une perception des dégâts causés. Il s’est rendu compte que la radicalité de la politique du FMI était catastrophique pour les pays du Sud. Mais, à l’arrivée, c’est simplement une manière différente de présenter les choses. L’idéologie de base n’a pas changé : le moins d’Etat possible, le plus de rigueur possible [une mission du FMI vient de recommander de ramener le déficit budgétaire à 5,5% en 2010, ndlr] et la pleine confiance dans le secteur privé. On ne demanderait pas mieux que le Fonds monétaire international ait vraiment changé, mais il reste dans la même logique de primat du marché et d’affaiblissement de la puissance publique.»
Par ARNAUD DUBUS (à Bangkok).